jeudi 11 novembre 2010

Est-ce qu’être obèse mais en bonne forme physique assure une bonne santé ?


          Le concept « Fit but Fat » est basé sur des données scientifiques démontrant un certain paradoxe face à l’obésité. Il est possible d’être à la fois obèse et en forme [bonne capacité cardio-pulmonaire (CCP)]. Il est aussi possible d’avoir un poids sain, mais présenter une faible CCP. Le concept d’obèse ayant une bonne CCP suggère que la condition physique atténue les risques métaboliques, cardiovasculaires et de mort prématurée indépendamment du niveau d’obésité.  La question qui brûle nos lèvres est lequel de ces deux profils est mieux pour la santé d’un individu? Ce post porte donc sur la comparaison entre ces deux groupes d’individus.
          Normalement la CCP est mesurée par un test à l’effort qui impose une augmentation progressive de l’intensité à l’effort se traduisant par une augmentation de la fréquence cardiaque, de la consommation et de l’utilisation d’oxygène. De façon simpliste, plus un individu a une bonne CCP, plus il est capable de transporter et d’utiliser l’oxygène au cours d’un test d’effort et ce, peu importe si le test estime la CCP (ex. course de navette au gymnase) ou la mesure objectivement (ex. protocole de Bruce au laboratoire). Cette valeur est énormément influencée par la génétique alors que l’entraînement permet de l’augmenter jusqu’à un maximum de 25% indépendamment de la modalité de l’entraînement comme le démontrent la figure ci-dessous. Cette étude comparait trois différentes interventions [Groupe 1 : volume faible/intensité modérée (19,2 km/sem à 40-55% de la CCP), Groupe 2 : volume faible intensité élevée (~ 32 km/sem à 65-80% de la CCP), groupe 3 volume élevé/intensité élevé (~ 32 km/sem à 65-80% de la CCP)] LIEN. Après six mois d’entraînement, on note une amélioration linéaire entre le volume/intensité et le pourcentage d’amélioration du CCP pouvant aller jusqu’à 19%.



          Existe-t-il beaucoup d’obèses avec une bonne CCP? Comment catégoriser bonne et mauvaise CCP? Une étude récente permet d’établir que 8,7% des gens âgés de 20 et 49 ans serait obèse, mais aurait une bonne CCP. Quels-sont les critères? Selon les spécialistes du domaine, les individus se situant dans le 40e percentile supérieur de leur catégorie (âge et sexe)  considérés comme ayant une bonne CCP, car ce niveau est associé à un faible risque de maladies chroniques. De l’autre côté, les individus se situant dans le 20e percentile inférieur de leur catégorie sont considérés ayant une faible CCP LIEN.
Il faut savoir que la CCP est un facteur de risque pour plusieurs maladies chroniques indépendamment du niveau d’obésité. En d’autres mots, peu importe le poids corporel d’un individu, son risque  de maladie chronique et de mort prématurée est diminué s’il est en bonne condition physique. Ainsi, la question importante est : Est-ce qu’un individu obèse avec une bonne CCP présente les mêmes risques de maladies métaboliques, cardiovasculaires ou de mort prématurée comparativement à un individu de poids sain avec une mauvaise CCP? 
          Basé sur les données de l’Aerobic Center Longitudinal Study, le fait d’être obèse avec une bonne CCP rend ce groupe d’individu moins à risque de mortalité (toutes causes), de maladies cardio-vasculaires (Lee et al.,1999), de diabète de type 2 (Church et al.,2004), du syndrome métabolique (Church et al., 2004) d’incapacité physique chez les personnes âgées (Huang et al.,1998) comparativement aux individus de poids sain avec une mauvaise CCP. La figure suivante qui porte chez les femmes démontre bien ces propos (Farrell et al.,2002). Cependant, peu importe la population ou la condition métabolique étudiées, le résultat est similaire.


          Dès lors, la CCP est plus importante que le poids corporel pour la santé métabolique.  Alors oui, dans ce contexte il est plus avantageux d’être obèse et en forme plutôt que mince et en mauvaise forme  physique. CEPENDANT, ces résultats doivent être nuancés puisque l’obésité et le niveau de condition physique n’ont pas seulement un impact sur la santé métabolique des gens! Tant mieux si les gens considérés obèses deviennent actifs suite à la prise de conscience de ces résultats, mais il ne faut pas oublier les variables telles que le risque de dépression, une faible estime de soi, l’arthrite, l’apnée du sommeil dont les obèses sont plus à risque indépendamment du niveau de forme physique.

          En guise de conclusion, le meilleur scénario restera toujours d’avoir un poids santé et une bonne santé cardio-pulmonaire. Cependant, en ce qui concerne les maladies cardio-métaboliques (diabètes, tension artérielle, cholestérol,etc) si un obèse n’arrive pas à perdre du poids de façon permanente, l’exercice pourra du moins diminuer le risque d’apparition de ces conditions. De toute façon, la bonne nouvelle c’est que l’exercice améliorera la CCP, votre santé métabolique tout en améliorant vos chances de perdre du poids à long terme.

7 commentaires:

  1. Une bonne raison pour continuer de prendre soin de soi en faisant de l'activité physique tégulièrement meme si on est découragé de ne pas perdre du poids!

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  2. La pratique d’activité physique en endurance entraîne une augmentation de la sensibilité à l'insuline chez les sujets sains ainsi qu'une diminution de la résistance à l’insuline chez les sujets obèses et/ou diabétiques de type 2 (Scheen & Paquot 2001) De plus, on peut ajouter aux effets positifs une amélioration du profil lipidique, avec une diminution des concentrations du cholestérol total, du cholestérol LDL (Mauvais Cholestérol) et une augmentation du taux de cholestérol HDL (Bon Cholestérol). (Scheen & Paquot 2001) Ces effets métaboliques positifs sont donc tout à fait à l’avantage d’une pratique d’activité physique régulière. De plus, L’étude de Mcaulay et al. (2010) a rapporté une absence de corrélation entre l’IMC et le taux de mortalité. Ce phénomène est appelé le paradoxe de l’obésité.

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  3. Nous croyons qu'il est en effet plus bénéfique d'avoir un index de masse corporelle élevé et un bon niveau de condition physique que d'avoir un IMC normal mais un niveau de condition physique faible. D'une part, dans une revue systématique de la littérature publiée en 2010, Fogelholm présente des résultats affirmant que le taux de mortalité toutes causes confondues est plus faible chez les individus ayant un IMC élevé mais une bonne condition aérobie que chez ceux ayant un IMC normal mais une condition physique faible. La mortalité par maladie cardiovasculaire est également plus faible chez les individus en surplus de poids mais en bonne forme physique alors que, toutefois, le risque de diabète de type II est plus important chez ceux-ci comparativement à ceux ayant un IMC normal et une condition physique faible. Il semblerait que l’activité physique joue un rôle favorable indépendamment d’une perte de poids sur le profil métabolique, comme l’ont démontré Larson-Meyer, Redman, Heilbronn, Martin & Ravussin (2010). Également, en ce qui concerne les personnes âgées, un IMC plus élevé est négativement corrélé avec le taux de mortalité (Janssen, Katzmarzyk & Ross, 2005).

    Finalement, il est vrai qu’un surpoids entraîne à lui seul des problèmes d’ordre orthopédique et psychologique, mais il semble important de souligner qu’il n’existe aucun lien bien définit entre un surpoids corporel et la dépression (Atlantis & Baker, 2008). De plus, même si ce lien avait été explicite, il semble que la pratique d’activité physique améliore les états dépressifs (Byrne & Byrne, 2002). Il nous paraît donc évident qu’il est préférable d’être en surplus de poids mais de pratiquer l’activité physique que d’être normo-pondéral et de ne pas pratiquer d’activité physique.

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  4. En appui au dernier commentaire ainsi qu'aux propos de Martin et Danielle, une bonne capacité cardio-respiratoire réduira de beaucoup le risque de mortalité et ce, peu importe si le sujet est obèse ou normo-pondéral.
    Il est important de mentionner que l'aspect génétique demeure un des facteurs les plus important quant à la diminution des risques de maladies cardiovasculaires. En effet, un profil génétique favorable à une bonne santé cardio-respiratoire réduit les effets néfastes d'un surplus pondéral chez les individus obèses et/ou en surpoids. (Sims, 2001)

    De plus, il ressort d'une étude menée par Dugas et Noakes (2005)qu'une faible capacité cardiorespiratoire contribue à l'augmentation des risques de mortalités, et ce sans égard au poids du sujet.

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  5. Nous ne sommes pas totalement en accord avec les propos mentionnés, car il est ressorti par l'American Heart Association, grâce à une étude du Dr.Eaton "qu'il vaut mieux avoir un poids normal que d'être en surcharge pondérale et en forme", particulièrement sur le plan cardiovasculaire. Son étude révèle que lorsqu'un individu est en surplus de poids, il est préférable qu'il perde du poids pour revenir à un IMC normal plutôt que de demeurer avec un IMC élevé et être physiquement actif.Pour appuyer cette conclusion, cette étude démontre que le taux de cholestérol total,(TC/HDL) associé à un plus grand facteur de risque cardiovasculaire, était significativement plus bas chez les sujets normo-pondérés que chez les sujets présentant un excès pondéral.
    Bref, dans l'ensemble, un poids santé joue un plus grand rôle dans la diminution de la morbidité que les bienfaits de l'activité physique sur la santé cardiovasculaire. De plus, il est évident que de plus grands bénéfices psychosociaux sont associés à un poids normal, mais il faudrait se pencher davantage sur la question.

    Little L.(2005).Unfit and Lean have fewer cardiac risk factors that fit and fat, American Heart Association Scientific Sessions, Medscape Medical News, Abstract 3611.

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  6. Pour continuer sur les risques de dépression associés à l'obésité, il ne faut pas croire qu'une perte de poids soit la solution miracle pour un tel problème. Selon Chaput, Arguin, Gagnon et Tremblay (Appl Physiol Nutr Metab. 2008 Feb;33(1):86-92.), la perte de poids est aussi associée à certains symptômes de dépression. Donc si un obèse se présente demain dans ma clinique et que je dois choisir entre le faire maigrir ou le faire bouger, je crois que je pencherai vers la 2e option. À court et à moyen terme, cette option me semble porteuse de plus de bénéfices pour la santé. Si je dois répondre à la question principale de cette discussion, je dirais qu'il est préférable d'être grassouillet et actif que maigre et sédentaire.

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