Lorsqu’il s’agit de discuter de la prise de
poids lors de la grossesse, le sujet est très délicat ! En effet, qui n’a
jamais entendue une femme enceinte dire «
je dois manger pour deux maintenant » ou « j’en profite parce que c’est le seul moment où je peux prendre du
poids sans me sentir coupable ». Ce type de commentaires est la preuve
irréfutable que la société a évolué sur de nombreux aspects alors que d’autres
sont encore où ils étaient il y a 40 ans, et ce, malgré l’avancement des
connaissances sur le sujet.
Il
n’est pas rare d’entendre des femmes âgées affirmer qu’une prise de poids de
l’ordre de 40-50 lb au cours de la grossesse est idéale. Autrefois, ce gain
pondéral n’avait pas les mêmes répercussions qu’aujourd’hui principalement, car
les femmes avaient, en moyenne un poids inférieur en début de grossesse. En
effet, l’IMC moyen d’une femme âgée de 20-39 ans est passé de 22.5 kg/m2 à
25.9 kg/m2 entre 1981 et 2007 ce qui représente une différence de 10
kg (ou 22 lb) pour une femme de 5 pieds 7 pouces Statistiques Canada. Puisque le gain de poids optimal
durant la grossesse est essentiellement basé sur le poids initial de la femme, il
faut donc considérer ce changement de poids chez les femmes canadiennes pour
déterminer l’objectif de gain de poids durant la grossesse. Mais qu’en est-il
réellement? Combien de poids une femme enceinte doit-elle réellement prendre
pour s’assurer d’une santé optimale pour elle et son enfant?
Les
conséquences d’un gain de poids excessif durant la grossesse sont nombreuses,
sérieuses et très couteuses pour l’état. Grâce à une étude effectuée sur un peu
plus d’un million de
naissance publiée récemment dans un journal prestigieux, on cerne mieux le lien
entre le poids excessif pris par la mère au cours de la grossesse, le poids à
la naissance du bébé ainsi que les conséquences qui en résultent Lancet Journal.
Les auteurs concluent que chaque kilo pris par
la mère augmente le poids du bébé de 7,35 g. Rappelons que le poids dit ‘
normal ’ pour le bébé se situe entre 5,5 et 8,75 lb lors d’une grossesse (38-42
semaines).
Le niveau
d’obésité et l’âge de la mère lors de la grossesse ainsi que la prise de poids
durant cette période prédisent les risques de diabète de grossesse (diabète
gestationnel), l’IMC futur de
l’enfant ainsi que le risque de diabète de type 2 éventuel pour la mère et
l’enfant. En effet, 30 et 66% des
femmes ayant développé un diabète gestationnel (souvent associé positivement à
l’IMC) vont présenter un diabète de type 2 au cours des 10 années qui suivent
la naissance de l’enfant Diabetes Care Journal. Le
diabète gestationnel procure au fœtus un environnement extrêmement riche en
glucose ce qui interfère avec la sécrétion d’insuline au niveau du pancréas et
augmente le poids à la naissance, l’IMC
au cours de l’enfance et de l’adolescence ainsi que le risque de diabète de
type 2 Nature Journal.
Mais
qu’est-ce qu’une prise de poids excessive ? Voici les taux de gain de poids et
gain de poids total recommandé durant les grossesses (1 seul bébé) en fonction
de l'IMC (poids en kg /taille en m2) avant la grossesse (l'Institute of
Medicine (IOM), 2009 IOM.
Calculer
votre IMC ici.
Un autre point que nous voulons soulever,
c’est le gain de poids associé aux différents éléments ‘structuraux’ liés à la
grossesse. On entend souvent, « je fais de la rétention d’eau, donc c’est
pour cela que j’ai pris autant de poids durant ma grossesse» ou « mes seins
doivent peser au moins 10 lb en ce moment ». Selon la référence suivante, la rétention d’eau compterait
en moyenne 3.7 lb du poids total à 38 semaines de grossesse et les seins 1.9 lb. Voici la distribution des gains
pondéraux moyens à 38 semaines de grossesse pour chaque élément lié
spécifiquement à la grossesse (Thomson et al.,1995).
En guise de conclusion, le poids qu’une femme
enceinte devrait prendre durant sa ou ses grossesses est principalement basé sur
son poids initial de celle-ci et non sur celui de sa mère, sa grand-mère ou sa
cousine ! De plus, comme le démontrent les tableaux ci-haut, ce gain de poids doit
majoritairement apparaitre durant le 2e et 3e trimestre
le fœtus et le tissu adipeux étant les composantes principales qui provoque le
gain de poids (moy :14,9 lb).
Le gain de poids excessif risque d’affecter autant la santé future de la
mère et de l’enfant.
Oui et bien votre post sonne l'alarme et décourage surement bien des filles mais si c'est la réalité, il faut s'y fiare. Merci de vulgarisé l'information sans faire de jugements.
RépondreSupprimerJ'ai un commentaire sur votre dernier tableau. Je ne connais pas l'étude dans laquelle il fut publié mais je trouve peu probable qu'il n'y ait eu aucune variation de la masse musculaire avec la surcharge pondérale découlant d'une grossesse. Peut-être que l'inactivité de certaines femmes pendant leur grossesse fausse légèrement les données mais en toute logique, à niveau d'activité similaire, les études sont nombreuses à prouver que le gain de poids est plus souvent qu'autrement accompagné par un gain de masse musculaire. La technique utilisée pour évaluer la composition corporelle semble suffisamment précise pour détecter ce genre de différence! 30 lbs de plus, c'est une différence non négligeable. Peut-être que la différence de poids n'est pas présente assez longtemps pour faire apparaître ce genre de différence. Peut-être aussi que les ressources disponibles sont allouées exclusivement à la croissance du foetus et que la dernière priorité d'un point de vue métabolique est l'hypertrophie musculaire.
RépondreSupprimerJ'aimerais avoir votre avis scientifique en tant qu'experts de la composition corporelle.
Merci!
Premièrement, le tableau comprend les éléments les plus importants. Il y a aussi une catégorie 'autres' qui peut comprendre la masse musculaire. Deuxièmement, 60% de la population est inactive et davantage chez les femmes. Ce haut taux de sédentarité ne diminue pas durant la grossesse et il est vraisemblable que les femmes actives peuvent maintenir leur masse musculaire sans toutefois l'augmenter. Lorsque les femmes prennent du poids lors de la grossesse, elle prennent davantage de masse grasse pour remplir les nouveaux rôles de mère comme la formation du lait maternel. Finalement, votre commentaire fait surement référence à une idée préconsue qui dit que plus une personne est obèse et plus elle a de masse musculaire. Ceci dit, il existe passablement beaucoup de gens obèses qui ont une faible masse musculaire. On les appellent les obèses sarcopéniques.
RépondreSupprimerIl serait intéressant de suivre la composition corporelle de femmes enceintes afin de confirmer que le gain de poids n'est pas dû à un changement de la masse musculaire. Comme vous l'avez mentionnez les méthodes actuelles le permettraient, cependant dans un contexte clinique, c'est l'accessibilité à de telles ressources qui ne permet pas d'en faire les observations.
Bref, sous toutes réserves nous croyons que la prise de masse musculaire durant la grossesse est négligeable dans la plupart des cas.
Danielle et Martin